La ville de Bunia, chef-lieu de la province de l’Ituri, est le théâtre d’un phénomène grandissant et préoccupant : l’addiction des jeunes aux paris sportifs. A la recherche d’argent facile, de nombreux jeunes investissent le peu qu’ils possèdent dans des jeux de hasard, espérant multiplier leurs gains et échapper à la précarité.
Ce phénomène est alimenté par la prolifération de nombreuses maisons de paris sportifs dans la ville et ses environs. Des enseignes comme Ngenge Sport, Parico, Chance, King, parmi d’autres, pullulent, rendant l’accès aux jeux d’argent de plus en plus facile pour une jeunesse souvent désœuvrée.
Pour beaucoup de jeunes, le pari sportif est perçu comme une bouée de sauvetage face à la réalité économique difficile. «Je mets mes 500 francs dans un match, et si j’ai de la chance, je peux gagner 5000, voire 10 000 francs. C’est plus rapide que de chercher un travail», explique un jeune parieur rencontré au centre-ville.
Un autre, sourire en coin, ajoute : «Je n’ai pas de diplôme, pas de perspective. Le foot, c’est ma passion, et ça peut me rapporter gros». Cependant, derrière l’espoir du gain facile se cache souvent une spirale de pertes et d’endettement.
«Au début, je gagnais un peu, ça me donnait l’impression que c’était facile. Mais après, j’ai commencé à perdre, et je remettais toujours pour essayer de récupérer mes pertes. C’est un cercle vicieux» témoigne Olivier, un jeune homme qui dit avoir perdu toutes ses économies.
Des experts en psychologie et en développement social tirent la sonnette d’alarme. «Le pari sportif offre une illusion de contrôle et de richesse rapide, particulièrement séduisante pour des jeunes en quête de solutions à leurs problèmes économiques», explique un psychologue . Il ajoute : «L’addiction au jeu est une réalité. Elle peut entraîner des conséquences graves, allant de la ruine financière à la désintégration sociale, en passant par des problèmes de santé mentale».
Un économiste analyse la situation : «Cette multiplication des maisons de paris et l’engouement des jeunes pour ces jeux sont le reflet d’un problème plus profond : le manque d’opportunités socio-économiques. Au lieu d’investir dans la formation ou de petites activités génératrices de revenus, les jeunes sont attirés par ces raccourcis illusoires».
Les jeunes eux-mêmes reconnaissent parfois la difficulté à se détacher de cette habitude. «Quand tu es dedans, c’est dur de s’arrêter. Même quand tu sais que tu perds plus que tu ne gagnes, l’espoir du gros lot te retient». avoue un parieur régulier.
Face à ce phénomène, la question de la régulation et de la sensibilisation se pose avec acuité. Les autorités et les acteurs de la société civile sont interpellés pour mettre en place des mesures de prévention et d’accompagnement pour les jeunes tombés dans ce piège.
Jonas Mukonkole